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Photo du rédacteurLe Bestiaire Rouge

L'architecte de sol fertile

Dernière mise à jour : 30 janv. 2020


Dessin © Le Bestiaire Rouge / Aurélie Portier

JE SUIS un animal fouisseur qui contribue au mélange permanent des couches du sol. Ver de type anécique*, je me nourris de la matière végétale morte que je trouve à la surface du sol. J'entraine les débris de plantes dans les galeries verticales que je creuse où des microorganismes (champignons et bactéries, seuls à pouvoir décomposer la cellulose et la lignine des plantes) les pré-digèrent et me les rendent plus accessibles. Je suis très extensible grâce aux 150 segments en moyenne en forme d'anneaux qui composent mon corps. Mon corps est paré de soies (poils courts microscopiques) que j'utilise comme des harpons pour me déplacer dans la terre. Je respire au travers de ma peau. Le mucus qui la recouvre me permet de glisser dans la terre sans me blesser. Ma coloration rougeâtre à brun foncé sur le dos, due à un pigment sanguin voisin de l'hémoglobine, me protège des UV lorsque je remonte à la surface pour me nourrir. Je crains la pluie qui tambourine le sol (m'évoquant la présence de mon prédateur souterrain, la taupe) et inonde mes galeries. Pour éviter la noyade, je remonte à la surface, ce qui m'expose à mes nombreux autres prédateurs (hérisson, oiseaux, grenouilles...). Comme les escargots, je suis hermaphrodite (à la fois mâle et femelle) mais nous devons être deux pour nous reproduire.



Le ver de terre est un jardinier naturel indispensable. Il travaille et structure le sol en creusant des galeries qui l'aèrent, permettent l'infiltration et la conservation de l'eau et facilitent l'implantation des racines des plantes. Il stimule la vie microbienne par le brassage de la matière organique et enrichit la terre en éléments nutritifs avec ses déjections.

Je joue un rôle clé dans le maintien et l'entretien des propriétés physiques des sols. Par mon brassage de matière organique, je favorise la vie du sol (bactéries et champignons du sol). Les galeries stables et verticales souterraines que je creuse assurent l'infiltration de l'eau profonde et rapide, favorisant la rétention d'eau du sol et limitant le ruissellement. Mes galeries débouchant en surface assurent aussi une bonne aération du sol en améliorant les échanges gazeux et la respiration. En ameublissant ainsi la terre, je réduis fortement les risques d'érosion des sols. Ces galeries permettent aux racines des plantes de s'implanter profondément dans le sol et se nourrir de mes excréments qui tapissent les parois. Les déjections que je rejette à la surface du sol sous forme de turricules favorisent la croissance des plantes et renouvelle la couche arable du sol. Ce compost (mélange de particules végétales et minérales, enrichi en bactéries, protozoaires...) ou humus que je dépose sur le sol et qui contient des éléments nutritifs en forte concentration a donc une action fertilisante pour les plantes.





L'espèce humaine distingue trois espèces de vers de terre :

  • Les vers épigés de petite taille, de couleur rouge brunâtre (plus résistants à la lumière), se nourrissent de la litière de surface du sol (résidus de feuilles mortes...). Vivant près de la surface du sol, on les trouve en grand nombre dans les composts.

  • Les vers endogés de taille moyenne creusent des galeries horizontales ou superficielles et vivent quasi uniquement sous terre, d'où leur transparence et pâleur. Ils se nourrissent de la matière organique contenue dans la partie minérale du sol.

  • Les vers anéciques* vivant sous terre dans des galeries verticales et remontent en surface pour se nourrir de matière organique (débris de plantes) qu'ils ramènent dans leurs galeries pour la décomposer.


Contrairement à une idée reçue largement répandue, si on me coupe en deux, j'ai peu de chance de survie et encore moins de me dédoubler. La partie contenant mes organes vitaux comme ma tête et mes organes sexuels pourrait éventuellement survivre en régénérant les anneaux postérieurs manquants. Ce phénomène, limité pour mon espèce, est souvent confondu avec celui du ver planaire, un ver aquatique qui peut se régénérer même après avoir été coupé en petits morceaux. Ce qui explique mon faible taux de survie en cas de labour du sol par des machines à soc telles que les charrues ou motoculteur. Ces machines détruisent mon habitat avec mon réseau de galeries souterraines et compactent les couches profondes du sol augmentant ainsi les risques de ruissellement (l'eau pénétrant mal dans le sol) et donc d'érosion des sols... La pratique intensive et industrielle de l'agriculture a d'autres effets néfastes sur moi à cause de l'épandage d'engrais chimiques et de pesticides.



La présence du ver de terre est bon indicateur de la santé du sol. Les vers peuvent disparaître presque totalement dans les sols cultivés de manière trop intensive ou incorrecte. Les sols où il n'y a plus de vers de terre deviennent stériles...

Je suis aussi menacé par une espèce invasive, les plathelminthes. Conséquence de la mondialisation et de l’accroissement des échanges de marchandises avec l’introduction d’espèces exotiques envahissantes, ces vers plats exercent sur nous une forte prédation.


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Des idées pour aider les vers de terre

CONSERVER UN SOL VIVANT


Le rôle clé du ver de terre dans les cultures est aujourd'hui reconnu (il augmente les rendements de 30 %, comparativement à des parcelles sans vers de terre). Entre un et trois millions de vers de terre vivent dans une terre en bonne santé d’un hectare de prairie. Les espaces naturels non défrichés ni pollués sont des habitats de choix pour le ver de terre. Cependant, dans le cas de terres cultivées, de bonnes pratiques permettent de garder de bons rendements sans détruire les vers de terre et la vie du sol. Se référer aux pratiques de la permaculture et de l'agroécologie.



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Sources, Références & Inspirations :

L'INPN (l'Inventaire National du Patrimoine Naturel) : https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/233129

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